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Channel: Noirs desseins » Thompson
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Un bon démon…

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Les adaptations de Jim Thompson sur grand écran sont pléthores. De nombreux réalisateurs ont tenté, et souvent réussi, de l’adapter. Il faut dire que Jim avait lui-même, en tant que scénariste, beaucoup travaillé pour Hollywood dans les années 50, notamment avec un jeune Kubrick qui, avec The killing, lançait véritablement sa carrière.

S’il ne s’agit pas, dans ce papier, de dresser une liste exhaustive de tous les réalisateurs qui ont "tourné leur Thompson", je ne peux m’empêcher de remarquer que les Français qui l’ont fait s’en sont bien tirés. Revoyez Coup de torchon ou Série Noire, vous aurez, selon moi, d’assez bons exemples de ce qu’est une adaptation, voire une transposition de roman.

Bref, venons-en, à ce Killer inside me, réalisé par un Winterbottom dont on ne mettra pas en cause le savoir-faire mais qui n’est pas non plus un modèle de réalisateur forcément original. Jusqu’à maintenant car je ne peux qu’admettre qu’il s’en tire plutôt très honorablement ici.

Tout d’abord, le casting est impeccable. Casey Affleck campe un Lou Ford étonnamment crédible et assez proche de l’idée que l’on peut se faire du personnage du roman. Impeccable dans son rôle de shérif psychopathe bien propre sur lui, l’acteur donne du corps, de l’épaisseur à son personnage. Il en va de même pour les deux figures féminines de cette quasi-tragédie, Kate Hudson et surtout la belle Jessica Alba dont on reconnaîtra une justesse de jeu qu’on ne lui soupçonnait guère. Comme quoi, il est toujours bon de se libérer de ses préjugés tenaces…

Ensuite, puisqu’ici on parle de film noir, Winterbottom est parvenu, non pas à coller aux clichés du genre mais à y inscrire son film. En clair, il en a respecté la grammaire, la cahier des charges: on a bien une histoire d’amour, perverse certes mais comme dans bon nombre de films noirs, des personnages typés et souvent ambigus. Dans le même ordre d’idée, on a apprécié les choix du Britannique en termes d’images: il a saturé quelque peu ses couleurs, notamment les nuances de jaune qui rendent compte, à juste titre, de l’atmosphère de chaleur de cette histoire se déroulant dans un Texas semi-rural.

De plus, Winterbottom a pris le parti de coller à l’intrigue, à son déroulement – intrigue sur laquelle je ne reviendrai pas. Je me contenterai de vous renvoyer à ma chronique récente sur le roman -, à retranscrire les principaux événements du livre de Thompson. On remarquera qu’il en respecte l’esprit autant que la lettre; chose pas forcément évidente quand on s’attelle à une transposition car il s’agit, dans ce cas, de traduire des mots par des images.

Si beaucoup ont pu déceler une forme de complaisance, notamment lors de certaines scènes de violence, insupportables il est vrai, cela n’a pas été mon cas. Les gros plans sur le visage de Jessica Alba martyrisée par Affleck traduisent plutôt l’incompréhension de son personnage qui ne semble pas saisir ce qui lui arrive. Surtout, ces scènes ne versent jamais dans un voyeurisme gratuit ni dans une stylisation ridicule, à l’image de certaines productions cinématographiques qui prétendent au lyrisme en usant de ralentis ou d’effets à prétention poétique dans leur représentation de la violence. En outre, si Winterbottom en fait plus que Thompson dans la scène sus-citée, il respecte le texte dans l’affrontement entre Lucille (devenue Amy ici) et Lou, et se montre elliptique lors de l’épisode de la prison. En bref, le réalisateur a fait des choix et ceux-ci ne sont pas si mauvais que cela.

The killer inside me est donc un bon exemple d’un film noir à la fois proche d’une vieille tradition et néanmoins personnel. Une belle lecture sur grand écran d’un de nos écrivains préférés



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